À
l’heure où les fusils anonymes exécutent devant chez lui une grande
figure politique de la société tunisienne, c’est tout sauf le moment
d’entonner les discours sur l’échec inéluctable des révolutions et de se
livrer aux prophéties rétrospectives qui l’avaient bien dit. Assassiné
sur le pas de sa porte, Chokri Belaid n’est pas le spectre de nos
mélancolies. C’est un avocat. C’est un homme qui avait pris l’habitude
de se tenir debout parce que c’est debout qu’il avait consacré la plus
grande partie de sa vie à défendre sans distinguer ni discuter les
intellectuels marxistes, les acteurs démocratiques, les militants
islamistes, dans toutes les circonstances où le régime de Ben Ali
prospérait en déniant les droits, en étouffant les libertés et en
consolidant sa dictature. C’est un opposant qui était devenu le
secrétaire général d’un parti occupé à constituer un courant patriote et
démocrate au sein de la société tunisienne. C’était un acteur courageux
et engagé dans le moment historique.
L’heure où
l’on tue un homme qui n’agit pas autrement que ne font tous les
citoyens du monde, pas autrement que nous-mêmes faisons ou devrions
faire chaque jour, est l’heure de dire des choses simples. L’assassinat
politique détruit tout monde possible. Il ne peut tout simplement pas
être toléré. De la même façon qu’on ne doit pas continuer de tolérer que
des Ligues de protection de la Révolution s’activent chaque jour à
instiller la peur et à propager un climat de violence dans toute la
Tunisie. Il est impératif et urgent d'exiger que tous les Tunisiens
reçoivent la protection qui leur est due. De la garantir spécialement à
tous les militants, intellectuels, artistes et autres acteurs de la
société tunisienne qui sont aujourd’hui la cible d’actions fanatiques,
violentes, meurtrières.
En mémoire de
Chokri Belaïd...de son combat, sans fin, comme tous les nôtres, et de sa
vie, éternellement fragile, comme toutes les nôtres
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